La pierre rejetée devient pierre d’angle

27e dimanche du Temps ordinaire, Année A,
8 octobre 2023, Matthieu 21,33-43

D’une conférence de Zundel au Cénacle de Paris en janvier 1968, où il montre de quelle manière Jésus devient la pierre d’angle d’une relation nouvelle avec Dieu et entre les hommes.

Jésus sait très bien ce qu’il y a d’explosif dans le terme de Messie qui a une saveur proprement révolutionnaire dans la conjoncture où il vit. D’ailleurs, il interdit absolument à ses disciples de l’employer à son égard.

En ce temps-là,
Jésus disait aux grands prêtres et aux anciens du peuple :
« Écoutez cette parabole :
Un homme était propriétaire d’un domaine ;
il planta une vigne,
l’entoura d’une clôture,
y creusa un pressoir et bâtit une tour de garde.
Puis il loua cette vigne à des vignerons,
et partit en voyage.
Quand arriva le temps des fruits,
il envoya ses serviteurs auprès des vignerons
pour se faire remettre le produit de sa vigne.
Mais les vignerons se saisirent des serviteurs,
frappèrent l’un,
tuèrent l’autre,
lapidèrent le troisième.
De nouveau, le propriétaire envoya d’autres serviteurs
plus nombreux que les premiers ;
mais on les traita de la même façon.
Finalement, il leur envoya son fils,
en se disant :
‘Ils respecteront mon fils.’
Mais, voyant le fils, les vignerons se dirent entre eux :
‘Voici l’héritier :
venez ! tuons-le,
nous aurons son héritage !’
Ils se saisirent de lui,
le jetèrent hors de la vigne
et le tuèrent.
Eh bien ! quand le maître de la vigne viendra,
que fera-t-il à ces vignerons ? »
On lui répond :
« Ces misérables, il les fera périr misérablement.
Il louera la vigne à d’autres vignerons,
qui lui en remettront le produit en temps voulu. »
Jésus leur dit :
« N’avez-vous jamais lu dans les Écritures :
La pierre qu’ont rejetée les bâtisseurs
est devenue la pierre d’angle :
c’est là l’œuvre du Seigneur,
la merveille devant nos yeux !

Aussi, je vous le dis :
Le royaume de Dieu vous sera enlevé
pour être donné à une nation
qui lui fera produire ses fruits. »

Conférence, Paris, 1968
Mise en ligne: 06.10.23
Temps de lecture: 2 mn

Il les a laissés reconnaître une fois, au cours de sa carrière publique, cette qualité, dont il ne se réclame jamais lui-même, pas plus qu’il ne se réclame d’ailleurs d’une filiation divine qui était, à ce moment-là, impossible à exprimer.

Le vrai sanctuaire, c’est l’homme!

Il fait bien allusion à un fils. Il s’appelle lui-même couramment le Fils de l’Homme. Mais Il laisse le secret de sa personne dans un état d’ambiguïté. Il pose une question: il ne donne pas à cette question une réponse, que les hommes ont à donner en faisant la découverte de Dieu à travers un échec infini.

Donc, il s’en faut que les Evangiles, à travers les documents qui résultent eux-mêmes d’un travail de la foi, nous empêchent de considérer la situation de Jésus comme quelque chose d’impossible; nous pouvons envisager le ministère de Jésus comme un tissu de difficultés insurmontables, mais aussi supposer, de sa part, un sens de ce qui était possible et de ce qui ne l’était pas, avec un souci de s’exprimer de manière à ménager l’avenir, à le rendre possible sans piétiner le passé et sans susciter, contre cet avenir qu’il voulait préparer, un blocage définitif.

Nous pouvons nous rendre compte, d’ailleurs, de l’immense itinéraire parcouru dans cette brève carrière de Jésus-Christ par le fait que l’homme le plus génial, celui qui a le plus fait pour accréditer le message de Jésus-Christ et pour porter sa Présence aux nations, je veux dire saint Paul, a été aussi, à l’origine, l’ennemi le plus acharné.

Il a senti l’incompatibilité absolue entre ce que le Christ apportait et ce que la tradition des Pères, dans laquelle il avait été nourri, affirmait. Et c’est parce qu’il a senti cet écart qu’il a voulu percer dans l’œuf l’Eglise naissante qui commençait à propager le témoignage de Jésus-Christ.

D’autre part, le Grand Prêtre qui porte le destin de la nation, a senti, lui aussi, l’immense danger qu’était pour la nation – du moins ce qui en subsistait – la présence de ce prophète mal accrédité qui n’avait pas fait d’études régulières, qui venait d’une province méprisée et dont les dires ambigus pouvaient être pleins de dangers. Et il ne se trompait pas: le destin de la nation se jouait, en effet, puisque Jésus allait être la pierre d’angle d’une religion universelle qui refuse de reconnaître un peuple élu, en établissant justement avec Dieu des rapports de personne à personne dans l’intimité de chacun.

Nous envisageons donc toute cette histoire avec un regard entièrement neuf, si nous la prenons, dès le départ, dans cette sorte de nœud tragique, où une mission impossible, eu égard aux circonstances, prend son départ.

Si nous nous reportons maintenant à la fin, nous pouvons symboliser, dans un épisode, le dénouement tragique et définitif. Cet épisode, c’est le Lavement des pieds qui se situe aux derniers jours de Jésus, ce Lavement des pieds qui est comme la révélation brusquée de tout le secret.

Il signifie, d’une part, que le Royaume de Dieu est au-dedans de nous, que le ciel est ici, maintenant, au-dedans de nous, que Dieu est, comme Jésus l’avait présenté à la Samaritaine, une source en nous qui jaillit en vie éternelle, que le Temple n’est plus le sanctuaire prodigieux et magnifique et qui fait l’admiration des Juifs du monde entier quand ils viennent en pèlerinage.

Le vrai sanctuaire, c’est l’homme! C’est l’homme!

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