Guérir en toute finesse

4e dimanche du Temps Ordinaire,
Année B, 28 janvier 2024, Marc 1, 21-28

D’une conférence de Maurice Zundel sur l’humour dans l’Évangile, donnée au Caire en 1961. Les guérisons à la synagogue, dont la première fait l’objet de l’Évangile de ce dimanche, donneront lieu à des controverses, dont Jésus évite le piège avec humour et finesse.

L’humour polémique a souvent l’allure d’un piège socratique, où l’interlocuteur est réduit aux abois. Son silence ou sa réponse découvrent également son jeu et la mauvaise foi de sa position. 

Jésus et ses disciples entrèrent à Capharnaüm.
Aussitôt, le jour du sabbat,
il se rendit à la synagogue, et là, il enseignait.
On était frappé par son enseignement,
car il enseignait en homme qui a autorité,
et non pas comme les scribes.
Or, il y avait dans leur synagogue
un homme tourmenté par un esprit impur,
qui se mit à crier :
« Que nous veux-tu, Jésus de Nazareth ?
Es-tu venu pour nous perdre ?
Je sais qui tu es :
tu es le Saint de Dieu. »
Jésus l’interpella vivement :
« Tais-toi ! Sors de cet homme. »
L’esprit impur le fit entrer en convulsions,
puis, poussant un grand cri, sortit de lui.
Ils furent tous frappés de stupeur
et se demandaient entre eux :
« Qu’est-ce que cela veut dire ?
Voilà un enseignement nouveau, donné avec autorité !
Il commande même aux esprits impurs,
et ils lui obéissent. »
Sa renommée se répandit aussitôt partout,
dans toute la région de la Galilée.

Conférence, Le Caire (Egypte), 1961
Mise en ligne: 25.01.23
Temps de lecture: 2 mn

C’est ainsi que Jésus interroge dans une synagogue, le jour du sabbat: «Est-il permis de faire du bien le jour du sabbat plutôt que le mal? de sauver une vie plutôt que de la tuer?», comme nous le lisons en Marc 3, 4.

Une question sans échappatoire…

Cette question est le prélude à la guérison de l’homme à la main desséchée. Cette question reste naturellement sans réponse, puisque les adversaires, devant cette mise en demeure, refusent de se découvrir.

Dans le récit parallèle de cet épisode en Matthieu 2, 11, Jésus pose la question si concrète: «Lequel d’entre vous n’ayant qu’une brebis, si elle tombe dans une fosse le jour du sabbat, ne s’efforcera de l’en retirer?» Cette question, comme toutes les autres qu’il posera dans des circonstances analogues, ne comporte pas d’échappatoire.

«Lequel, par  exemple, lequel est le plus facile de dire: Tes péchés te sont remis ou  lève-toi et marche» (Luc 5, 23). Le surgissement du paralytique, emportant son grabat cautionnera une affirmation par elle-même invérifiable, celle qui a scandalisé ses interlocuteurs: «Tes péchés te sont remis».

Le chef d’œuvre de l’humour polémique est cependant peut-être en Luc 10, 25-37: la parabole du bon samaritain, où le schismatique détesté doit être reconnu par un docteur de la Loi comme le modèle de la charité, alors que le prêtre et le lévite dévots se sont arrangés pour ne pas voir le malheureux gisant au bord de la route.

Quand on se rappelle la haine ancestrale entre Juifs et Samaritains, le mépris que les premiers avaient pour les seconds qu’ils détestaient plus encore que des païens, la rivalité de leurs sanctuaires qui avait amené la ruine du temple samaritain sous le règne de Jean Hyrcan, il est impossible de ne pas voir dans le choix que Jésus fait de son héros dans la parabole, une ironie à la fois très fine et très profonde, puisque c’est le docteur lui-même qui a posé la question: «A quoi reconnaîtrai-je mon prochain?»

Il doit convenir que dans l’histoire, dans la parabole, c’est le Samaritain qui seul a su reconnaître son prochain.

Cette conclusion qui fait du docteur de la Loi celui qui est appelé à canoniser le Samaritain, nous conduit à une situation un peu analogue à celle qui serait créée par quelqu’un qui donnerait un chef de cellule communiste en exemple de vertu à un prélat romain…

Dernières publications

Œuvres complètes: publication du tome VII
Œuvres complètes: publication du tome VII

Œuvres complètes: publication du tome VII Ce septième volume des œuvres complètes rassemble deux ouvrages : La liberté de la foi et Morale et mystique. Auteur: Marc Donzé Mise en ligne:

Lire
Vivre la Parole qu’est le Christ
Vivre la Parole qu’est le Christ

Dieu n’est pas le Dieu des morts, il est le Dieu des vivants. Il n’est pas non plus l’auteur de la mort: la mort est venue du péché, parce que l’Homme s’est absenté de Dieu. Mais Dieu, lui, ne s’est pas absenté de l’Homme.

Lire
Envoyés dans le monde pour la joie
Envoyés dans le monde pour la joie

La joie en soi, est meilleure que la douleur. Dieu n’aime pas la douleur, il déteste la douleur, il déteste la mort. Il y a entre Dieu et la mort, une inimitié personnelle, parce que la mort est la conséquence du péché, ce refus d’amour. Ce n’est pas lui qui a inventé la mort, la douleur et le péché.

Lire