Épiphanie du Seigneur: les signes offerts par la création

Epiphanie du Seigneur, Année B,
dimanche 7 janvier 2024, Matthieu 2, 1-12

Homélie de Maurice Zundel, donnée à Lausanne lors de la fête de l’Épiphanie en 1967.

La Fête de l’Épiphanie est la fête des signes, des signes que Dieu nous fait et qui sont évoqués dans l’antienne des Laudes de l’Office du Bréviaire: «Aujourd’hui à l’époux fidèle, l’Église était jointe parce que, dans le Jourdain, le Christ a été baptisé, les Mages accourent avec leurs présents aux noces royales, et les convives se réjouissent de l’eau changée en vin».

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu

Jésus était né à Bethléem en Judée,
au temps du roi Hérode le Grand.
Or, voici que des mages venus d’Orient
arrivèrent à Jérusalem
et demandèrent :
« Où est le roi des Juifs qui vient de naître ?
Nous avons vu son étoile à l’orient
et nous sommes venus nous prosterner devant lui. »
En apprenant cela, le roi Hérode fut bouleversé,
et tout Jérusalem avec lui.
Il réunit tous les grands prêtres et les scribes du peuple,
pour leur demander où devait naître le Christ.
Ils lui répondirent :
« À Bethléem en Judée,
car voici ce qui est écrit par le prophète :
Et toi, Bethléem, terre de Juda,
tu n’es certes pas le dernier
parmi les chefs-lieux de Juda,
car de toi sortira un chef,
qui sera le berger de mon peuple Israël.
»
Alors Hérode convoqua les mages en secret
pour leur faire préciser à quelle date l’étoile était apparue ;
puis il les envoya à Bethléem, en leur disant :
« Allez vous renseigner avec précision sur l’enfant.
Et quand vous l’aurez trouvé, venez me l’annoncer
pour que j’aille, moi aussi, me prosterner devant lui. »
Après avoir entendu le roi, ils partirent.

Et voici que l’étoile qu’ils avaient vue à l’orient
les précédait,
jusqu’à ce qu’elle vienne s’arrêter au-dessus de l’endroit
où se trouvait l’enfant.
Quand ils virent l’étoile,
ils se réjouirent d’une très grande joie.
Ils entrèrent dans la maison,
ils virent l’enfant avec Marie sa mère ;
et, tombant à ses pieds,
ils se prosternèrent devant lui.
Ils ouvrirent leurs coffrets,
et lui offrirent leurs présents :
de l’or, de l’encens et de la myrrhe.

Mais, avertis en songe de ne pas retourner chez Hérode,
ils regagnèrent leur pays par un autre chemin.

Homélie, Lausanne, 1967
Mise en ligne: 26.12.23
Temps de lecture: 2 mn

Cette antienne nous présente donc trois signes: – celui fait par les Mages, offrant leurs présents – celui du Baptême de Jésus, où retentit la Gloire de son Père, – celui des Noces de Cana où l’eau est changée en vin.

A travers ces signes, ce qui importe, c’est la manifestation de la Présence de Dieu qui se révèle à travers des éléments sensibles, en nourrissant précisément la vocation de l’univers humain.

Notre univers a cette propriété admirable de pouvoir symboliser, de pouvoir signifier, à travers le visible, l’invisible. Et c’est justement ce pouvoir de transfiguration et de signification qui fait toute la grandeur et toute la beauté du monde, et aussi toute la splendeur et toute la dignité de la vie humaine.

Nous sommes, comme tous les vivants, assujettis à des besoins imprescriptibles: boire, manger, dormir, et le reste. Mais, au-delà de ces besoins, il y a chez nous un besoin encore plus impérieux, un besoin de liberté, un besoin de ne pas s’enfermer dans les nécessités matérielles, un besoin, à travers le réseau même des besoins matériels, de symboliser un espace illimité de lumière et d’amour. Et cela, vous le savez bien, vous le faites constamment et spontanément, lorsque vous préparez un repas pour vos amis à seule fin d’apaiser leur faim, de les rassembler autour d’une table pour communier à leur amitié et en vous arrangeant pour dépasser l’empreinte des besoins matériels, afin que les yeux se réjouissent de votre générosité et que chaque élément du festin soit le symbole du don de vous-même.

Et, lorsque vous ouvrez votre maison, lorsque vous disposez l’ameublement, vous ne visez pas seulement à l’utile, à ce qui est indispensable pour la sécurité matérielle du corps, vous cherchez à introduire dans votre ménage une harmonie, une certaine musique qui fasse de tout le mobilier une puissance d’accueil. Votre maison, vous voulez qu’elle soit habitable, vous voulez que ceux qui y entrent se sentent accueillis par une présence amicale, et c’est ainsi que nous admirons la majesté du monde, la splendeur de la vie, tout spontanément à travers cette symbolisation instinctive qui nous fait recourir au visible, au sensible comme à la manifestation de l’invisible, du spirituel, de la présence, de la tendresse, de la bonté, de l’amour…

Et justement, ce régime des signes est par excellence le régime de la Révélation: Dieu nous parle par signes. Il nous parle par nous-mêmes, il nous parle par l’histoire que nous sommes, par tout le créé. Il n’y a pas une seule réalité qui ne puisse devenir le véhicule, l’instrument de la Présence divine comme une parole silencieuse qui retentit au plus intime de nous-même.

Les Mages ont vu l’étoile et l’étoile a lui dans leur coeur et ils sont allés vers ce coeur divin qui les attendait.

Jésus a entendu la voix du Père à son Baptême, cette voix qui était le signe que sa vie publique, maintenant, devenait une réalité, que l’humanité ne pouvait attendre davantage. Et puis en effet, aussitôt après son Baptême, Jésus embrasse sa mission en choisissant, à travers les tentations qu’il refoule, la voie dure qui va aboutir à la Croix.

Mais la Croix n’est pas le dernier mot: la Croix est le prélude de la Résurrection, la Croix est le prélude d’une transfiguration de tous les éléments du monde qui est symbolisée, aux noces de Cana, par le changement de l’eau en vin.

Et toujours nous voyons la réalité tournée vers le mystère, toujours la réalité capable d’être la manifestation de l’Esprit. Toujours nous voyons Dieu cheminant par les chemins de l’univers. Rien n’est meilleur pour nous, rien n’est plus utile que de méditer sur cette réconciliation du visible et de l’invisible; rien n’est plus merveilleux que de songer que nous n’avons pas à refuser le monde et à le mépriser, mais à l’aimer d’un amour infini, à l’aimer en le déchiffrant, à l’aimer en sentant le secret dont il déborde à nos yeux, pour en faire une offrande en laquelle nous échangerons avec Dieu.

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