19/12/09 – « j’enrage » quand on dit que Dieu permet le mal.

Suite 5 de la 2ème conférence donnée à Londres le 16 février 1964.

Dieu, première victime de tout mal est incapable même seulement de le permettre. L’Univers ne peut respirer l’amour qu’à travers nous. …

« Il serait inconcevable que nous croyions à l’amour de Dieu pour nous, inconcevable que nous croyions qu’il est vraiment celui qui veut notre bonheur et notre joie, sans que nous croyions qu’il est aussi le grand compatissant, et le premier frappé par tout ce qui peut nous atteindre.

C’est pourquoi j’enrage quand on dit :  » Dieu permet le mal.  » Mais non, Dieu ne permet jamais le mal ! il en souffre, il en meurt, il en est le premier frappé et, s’il y a un mal, c’est parce que Dieu en est d’abord la victime.

Lorsque Camus, dans « La peste », exprime le scandale qui l’atteignait au cœur, ce scandale de l’homme devant la douleur d’un petit innocent, d’un petit enfant torturé par la maladie, lorsque Camus exprime cette révolte, plus le scandale est énorme, plus il est évident que Dieu est visé, qu’il est frappé en plein visage, en plein cœur, car s’il n’y avait pas dans l’homme une Présence divine, le mal n’aurait pas ce caractère épouvantable.

Quand vous écrasez une punaise, sans cruauté, vous n’allez pas vous confesser d’avoir commis un crime sanglant. Il n’en serait pas de même si vous aviez tué un homme, parce que des punaises, il y en a toujours assez pour notre bonheur ! mais un homme, c’est justement ce consentement possible, c’est un pouvoir d’initiative. Un homme est irremplaçable parce qu’il introduit dans le monde un regard nouveau, parce qu’en lui tout l’univers rejaillit, parce qu’il est unique. Chacun de nous est unique, irremplaçable et constitue un foyer où l’univers, dans une nouvelle perspective, laisse resplendir le visage de l’éternel amour.

Dieu donc, dans l’univers, est l’amour, l’amour compatissant, l’amour crucifié, l’amour toujours victime, partout où il y a une douleur, une souffrance, un désespoir, une solitude, une mort et, à plus forte raison, cette dépression atroce qui le refuse d’aider. Et c’est parce que Dieu est victime que le monde est scandaleux, parce que le mal peut atteindre la plus haute valeur, le mal peut crucifier Dieu dans une vie d’homme.

C’est ce que François comprit lorsqu’il rencontra son frère le lépreux, c’était plus que l’homme, c’était Jésus-Christ qui souffrait dans ses membres. Et c’est pourquoi la rencontre avec le lépreux, il l’a consignée dans son testament comme un événement capital, parce que c’était sa première rencontre avec le Seigneur.

La création est une histoire à deux. Dieu ne peut pas la faire tout seul. L’univers est un immense chantier où nous avons à entrer pour assumer notre travail qui est d’achever l’univers dans la ligne de l’amour.

Car Dieu n’a pas voulu créer des cailloux, il n’a pas voulu créer la terre pour la terre, il a créé tout cela pour l’esprit, pour la pensée, pour la vérité, pour l’amour et tout l’univers est notre corps auquel nous devons infuser une âme à sa mesure, parce que nous sommes portés au commencement par l’univers, nourris par lui, ravitaillés en oxygène, protégés contre les rayons cosmiques.

Et, si nous sommes portés par la terre, nous avons à notre tour à la porter et tout l’univers, ce grand corps qui est le nôtre, et qui ne peut respirer l’amour qu’à travers nous, et que nous avons à achever pour en faire une offrande qui réponde à l’amour infini du Dieu vivant, lequel ne peut rien que s’offrir éternellement sans jamais s’imposer. » (à suivre)

Prière : Dieu, Dieu de Jésus-Christ ! premier compatissant de toute douleur humaine ! Premier frappé par tout ce qui peut nous atteindre ! Tu ne peux pas faire la création tout seul. L’Univers est un immense chantier où chacun de nous est envoyé ! Nous avons à l’achever dans la ligne de l’amour, en achevant ce qui manque aux souffrances du Christ ! Tout leur manque si personne n’y répond !

L’Univers, corps immense, notre corps, ne peut respirer l’amour qu’à travers nous !

Apprends-nous à en faire une offrande qui réponde à l’infinité de Ton amour, à l’infinité de l’amour du Père, du Fils et de l’Esprit !