08-13/12/2014 – Conférence – Confidences au Carmel de Matarieh

Maurice
Zundel, avec la Communauté du Carmel réunie au Parloir le jeudi 8 mai 1969 pour lui présenter les vœux à l’occasion de son Jubilé d’Or qui devait avoir lieu le 20 juillet suivant lorsqu’il serait de retour en Suisse. Non édité.

Je suis né à Neuchâtel, un petit canton suisse, le 21 janvier 1897. Ma grand-mère, la mère de ma mère était protestante (la moitié de la ville est protestante) et c’est elle, je pense, qui m’a le plus influencé dans toute ma vie. Par suite d’un contrat fait au moment du mariage, elle devait élever ses enfants en catholiques. Elle ne cessait de leur répéter : « Jamais de mariage mixte », tant elle en avait fait l’expérience douloureuse. Pourtant, elle est restée profondément protestante et c’est avec une grande douleur de cœur qu’elle a élevé ses enfants dans la religion de son mari, à laquelle elle ne croyait pas. Elle était très généreuse pour les pauvres et elle vivait constamment dans la présence de Dieu. De tous mes parents, elle était la plus chrétienne. Elle m’aimait beaucoup.

Mon père décida de me mettre à l’école communale – nous étions loin de l’Ecole des Frères. Mais la distance n’était pas la raison de cette décision. Mon père avait remarqué que les élèves des Frères, une fois sortis de l’École, étaient non pratiquants. C’était le cas de deux de mes oncles.

Bien que n’étant pas leur élève, j’étais tout le temps fourré chez les Frères, dont était mon oncle. Celui-ci aimait beaucoup la Sainte Vierge et c’est sans doute lui qui m’a donné une grande dévotion pour elle.

Depuis ma première communion, je me levais tous les jours à 5 heures pour aller à la Messe de 6 heures et je prenais mon petit déjeuner chez mon oncle. Il m’aimait beaucoup et il ne m’en voulait pas de ne pas fréquenter son école.

Aux écoles communales, où je suis resté jusqu’à ma quinzième année, tous les maîtres étaient protestants. Tous étaient bons, bienveillants et ils ne parlaient presque jamais du catholicisme. Parmi eux, il y en avait un qui m’aimait beaucoup et l’on sortait quelquefois ensemble. Alors, en ces moments, il dénonçait le catholicisme et il parlait facilement de tout ce qui lui déplaisait. Ce professeur est resté toujours mon ami et il est venu assister à ma première Messe.

Mes camarades étaient, pour la plupart, des protestants. Eux aussi étaient charmants. Les professeurs et mes compagnons savaient que je pensais à la prêtrise et tous, ils respectaient ma décision.

Pendant ce temps-là, je lisais beaucoup de livres savants pour répondre aux questions qu’on me posait. Je savais répondre à tout, mais ma connaissance était purement intellectuelle. C’est alors que j’ai été profondément impressionné par la lecture des Béatitudes que m’a faite un ami protestant. Il les a lues avec un accent tellement personnel, tellement convaincant, que j’en étais ému jusqu’au fond de l’âme. J’ai appris que ce garçon s’est suicidé plus tard.

Les pauvres ont bien marqué mes jeunes années. Encore petit, je voyais comment ma grand-mère aimait les pauvres. L’histoire d’un bandit racontée par Victor Hugo que j’ai entendue de mon jeune camarade protestant m’a beaucoup touché. Les pauvres ont été pour moi une grande grâce de Dieu.

Il y a une troisième grâce que Dieu m’a accordée pendant ma jeunesse – vers 15 ans. Un jour de la Fête de l’Immaculée Conception, pendant que je priais à l’église, devant une statue de Notre Dame, j’ai ressenti quelque chose d’intraduisible. C’était une grâce mystérieuse, une présence : il s’est passé quelque chose que je ne puis définir. J’en vis encore et cette présence a grandi avec les années.

Mes études secondaires finies, je devais aller à un collège catholique, si je voulais devenir prêtre. Alors, j’ai quitté ma ville natale pour entrer au séminaire de Fribourg où je suis resté, pour une année, faire de la philosophie. Les professeurs étaient de braves gens, mais les cours étaient médiocres et suivaient la discipline ceux qui voulaient, dont j’étais. Par bonheur, à la fin de cette année, j’ai choisi de finir mes études en langue allemande.

Donc, je suis allé chez les Bénédictins : c’était pendant la guerre et les moines naturellement étaient du côté de l’Allemagne. Ils pensaient que les Allemands chrétiens faisaient bien de combattre les Français athées. Mais on ne parlait pas beaucoup de politique et, quant à moi, j’étais plongé, perdu dans mes études et je n’étais nullement touché par les affaires politiques.

Nous autres étudiants, nous étions habillés comme les moines, en soutane et nous assistions tous les jours à la grand-messe, aux Vêpres et Complies suivies du Salve Regina solennel. On chantait le Salve Regina dans une chapelle dédiée à la Vierge où se trouvait une statue de Notre Dame qui avait miraculeusement échappé au feu. On l’appelle « la Vierge Noire«  et elle est vénérée par de nombreux pèlerins qui venaient et viennent encore en foule.

L’abbé du couvent était un saint et l’on gardait dans l’abbaye le plus grand silence et le plus parfait recueillement. La liturgie y était faite avec perfection. Je n’ai jamais assisté, depuis, à une messe pontificale où tous les ministres gardaient les yeux fermés. On parlait rarement de la liturgie, mais on en vivait intensément.

Après 2 ans, on a évacué tous les élèves non allemands, autrement, j’y serais resté. Cette abbaye est la patrie de mon esprit et j’y étais profondément heureux. Je suis resté toujours oblat de saint Benoît.

De nouveau, je suis retourné à Fribourg faire mes études de théologie. On nous enseignait le thomisme, mais les leçons n’étaient pas brillantes. J’avais sur mes professeurs l’avantage d’avoir lu la Somme, me levant à 2 heures et demi pour le faire. C’était toujours le temps de la guerre et la discipline du collège en souffrait. Il arrivait que les étudiants sortaient et rentraient à l’internat sans que le préfet en sache rien. Il les rencontrait parfois dans les rues sans les reconnaître, car il était myope.

J’avais hâte de finir avec les études et de sortir prêtre. Sur la prêtrise et sur le célibat, on ne nous disait rien du tout. On nous faisait étudier, passer des examens. Pour le reste, ça passait comme ça venait. Enfin, je suis sorti prêtre ; j’étais très jeune, j’avais 22 ans et demi le 20 juillet 1919.

On m’a mis vicaire dans la ville de Genève et on m’a donné une charge sur l’autre. J’étais aumônier d’un pensionnat de jeunes filles et aussi d’un hôpital, je devais faire le catéchisme aux enfants, donner des leçons de doctrine chrétienne aux collégiens, donner des cours à l’Université et aider les pauvres. Enfin, j’étais accablé de travail, surchargé à n’en pouvoir plus. Souvent, je disais mon bréviaire à minuit et à 2 heures et parfois à 4 heures du matin, je préparais mes classes. Je dormais peu, trop peu, deux heures.

Puis l’Internat de jeunes filles m’a donné congé. Encore, et par bonheur, après 6 ans de ministère, on m’a dénoncé à l’Archevêché, pour ma doctrine.

Comme l’Evêque ne voulait pas d’histoire avec Rome, comme il était littérateur plutôt que théologien, il a pris peur et il a décidé de me renvoyer. Tout à fait par hasard et malgré moi, j’ai appris certaines fautes commises par mon confesseur. Ce n’est que bien longtemps après que j’ai su que c’était lui qui m’avait dénoncé, de peur que je ne garde pas le secret. Après plusieurs années, je l’ai de nouveau rencontré, mais je ne lui ai jamais rien dit. Je n’ai pas essayé non plus de me défendre. J’allais encore chez mon confesseur lui parler de mes difficultés avec l’Évêque et il me consola avec des mots. A l’Archevêché, mon confrère était bien vu et il avait passé plusieurs années à Genève. C’est pourquoi on a cru tout ce qu’il a dit.

Cette épreuve m’était bien amère. Pourtant, elle m’était aussi salutaire et cette dénonciation était le plus grand acte de charité que mon confesseur a pu me faire, car, si j’avais continué cette vie, je me serais cassé le cou et peut-être, étant donné ma fatigue nerveuse et le surmenage extrême, j’aurais eu des écarts affectifs.

En réalité, c’est cette épreuve qui a donné la direction à tout le reste de ma vie. C’est elle qui m’a fait reprendre mes études, qui m’a donné le temps de penser, qui m’a fait trouver ma vocation d’écrire, qui m’a fait entreprendre tant de voyages en tant de pays et qui m’a fait faire connaissance avec les Anglicans et les Musulmans.

J’ai demandé à l’Evêque la permission d’aller à l’École Biblique, mais il me la refusa, l’École de Jérusalem étant alors suspecte. Il m’a envoyé à Rome étudier le Thomisme à l’Angelicum.

De nouveau, je me trouvais assis sur les bancs, étudiant, après toutes ces années du ministère le plus passionné et le plus passionnant et j’avoue que je l’ai trouvé bien amer. Mais je me suis mis à l’œuvre, je suis entré dans le jeu et j’ai travaillé avec acharnement.

Mes professeurs étaient des Dominicains, tous convaincus de l’infaillibilité du Thomisme, qu’ils enseignaient méthodiquement et rigoureusement avec, bien entendu, des examens, etc.

Cette époque valait surtout par sa discipline. J’ai d’ailleurs étudié saint Thomas sous tous ses aspects et j’ai vraiment assimilé le Thomisme le plus pur et le plus profond. Ce n’était pas inutile : c’était la doctrine traditionnelle de l’Église et un fondement indispensable pour toute pensée éventuelle renouvelée. J’ai dû de nouveau apprendre les arguments classiques sur Dieu, que Dieu est le premier moteur qui met tout en mouvement, la première cause dont tout dérive, etc.

Après deux années, mes études à Rome terminées, j’ai demandé à mon Évêque la permission de rentrer dans mon diocèse, mais je n’en étais pas digne. Il m’envoya à Paris où rien ne m’était préparé. C’était un ordre rigoureux : l’exil de ma patrie, la solitude, la coupure définitive d’avec mon ministère.

J’ai échoué dans une banlieue de Paris où j’étais affecté à un ministère : garder la sacristie et ramasser les tarifs. Au bout de 6 mois, je n’en pouvais plus et, par bonheur, les Bénédictines avaient besoin d’un aumônier, je suis allé chez elles à la rue Monsieur et j’y ai recommencé à vivre. Chaque jour, je chantais la Grand-messe en grégorien. La liturgie entière y était célébrée à la perfection, tous les jours. Il n’y avait rien que la liturgie pure, pas de sermons sauf pour les grandes occasions, Professions, prises de voile, etc. Le silence, le recueillement, l’observance y régnaient

Je crois que c’est à cette époque que j’ai commencé à trouver ma pensée à moi. J’étais seul, je n’avais pas d’obligation de prêcher, alors je pouvais expérimenter sur moi-même toutes les mises en question qui se faisaient jour.

Comme j’avais la permission de l’index, j’étais au courant de tout. Je lisais beaucoup, je pensais encore davantage et surtout j’essayais d’écouter la Vérité telle qu’elle se présentait à moi. Puis, j’ai pris congé du Thomisme. C’est pendant ce temps-là que j’ai écrit Le Poème de la Sainte Liturgie. Ma pensée était encore théorique et j’étais loin de la mettre en pratique. Après un an et demi, les Bénédictines ayant pris d’autres dispositions, je devais les quitter.

Les Assomptionistes ont eu la grande bonté de m’inviter à Londres comme leur deuxième aumônier. Il y avait là un vieil aumônier qui ne se faisait d’ailleurs pas d’illusions sur sa charge. Un jour il me dit : « Nous ne sommes que des roues pour labonne marche de la grande machine » (Ici, le Père Zundel rit de bon cœur). Il ajouta qu’il ne me parlerait l’anglais que lorsque je le saurais. Il savait le français et nous nous parlions en français. Alors, j’ai pris l’Apologia de Newman et un dictionnaire, et de cette manière, j’ai appris l’anglais. La lecture de Newman terminée, je savais l’anglais et je m’exerçais avec mon confrère.

Pendant mon temps à Londres, je suivais des cours à King’s Ion. J’ai fait aussi une foule de connaissances, spécialement avec l’Église Anglicane. Un ministre, Finas Finton, me donna sa carte moyennant quoi je pouvais aller partout pour les cérémonies et les réunions anglicanes. Cet homme a vraiment été fraternel pour moi. C’est chez lui que j’ai rencontré des évêques anglicans renommés et aussi le fondateur de la semaine de l’Unité. J’assistais à presque tous les offices chez lui et souvent je me rendais à Westminster Abbey et St Paul’s Cathedral

J’ai eu l’occasion d’être présent à un congrès d’Anglo-Catholiques où on était venu de loin et où on était habillé en grande tenue, jusqu’aux calottes et bas violets. J’ai vu des ordinations des ministres des différentes confessions où chacun des ordonnés manifestait ses croyances particulières devant l’Evêque, l’un en faisant les génuflexions devant le Sacrement et les signes de croix, l’autre en n’en faisant pas et un troisième qui s’appelait moderniste et réservait ses convictions personnelles à des réunions intimes Ce fut pour moi une expérience très féconde et j’ai appris énormément de choses sur les Anglicans et j’ai acquis une grande ouverture sur l’Anglicanisme.

La fin de mes études arrivée, je suis retourné en Suisse et, au bout de trois ans, je suis rentré de nouveau en France où j’ai passé des années et des années. En 1937, je suis allé à Jérusalem, à l’École Biblique, pour une année. Il y avait tant de choses à apprendre en si peu de temps, le grec, l’hébreu, l’arabe, etc. Je m’y suis mis pour de bon. La nuit, je ne dormais que 37 minutes.

(Est-ce de ce temps et dans quel contexte que le Père a dit : « Je n’avais pas encore appris la folie de la Croix » ).

Mon séjour en Terre Sainte m’a donné l’occasion de faire connaissance avec les Juifs. J’ai été mal impressionné en voyant les femmes juives habillées comme les hommes, tandis que les arabes gardaient leur costume traditionnel

Le reste de ma vie errante, je l’ai passée entre Paris, la Suisse, Assise et l’Orient.

C’est à Paris, pendant l’été de 1939 que j’ai rencontré Louis Massignon et Mary Kahil qui m’ont suggéré une visite en Égypte. J’ai donc pris le chemin de l’Égypte par un bateau italien : la guerre étant déjà commencée, les Italiens étaient considérés comme amis des deux côtés qui en espéraient l’aide. Je devais rester chez les Dominicains, mais il n’y avait dans leur maison que deux pères et, dans les conditions de la guerre, m’accepter était impossible. Mary Kahil eut alors l’heureuse idée de m’amener au Carmel. (Arrivée la veille de Noël 1939).

Cela fait 30 ans. C’est beaucoup dans une vie, 30 ans de grâces et 30 ans de responsabilités : 30 ans où la Sainte Vierge a veillé sur moi – toujours et même depuis le commencement de ma vie jusqu’à maintenant. C’est elle qui a veillé sur ma santé et qui m’a sauvé de tout et de tous les dangers. Lorsque je pense à la vie que je menais à Genève, cette vie surchargée, cet activisme, c’était fou. Ce n’était pas une vie. Avec le manque de sommeil, le surmenage et l’épuisement nerveux presque total, j’aurais pu finir par perdre l’équilibre, par risquer de faire des bêtises, de tomber dans des écarts affectifs, peut-être.

Mais la Sainte Vierge m’a protégé. J’aime beaucoup la Sainte Vierge. Quand on la touche, on me touche et c’est pourquoi, lorsqu’on met en question le dogme de l’Immaculée Conception, je crois que je donnerais ma vie pour la défendre.

Je ne fais rien sans elle – rien qui vaille – et si je suis resté fidèle, c’est grâce â elle. Si j’aime son Fils, c’est grâce à elle. Tout ce que j’ai, je le lui dois.

Je me souviens que c’est à Genève, en donnant une leçon d’apologétique sur Dieu, première cause et premier moteur, etc. que je me suis senti tellement mal à l’aise de parler de Dieu de cette manière, que j’ai vraiment eu honte. Je parlais de Dieu, j’écrivais sur lui mais sans vivre de lui : j’étais un intellectuel de religion, j’étais un pharisien, un hypocrite. Pardon, pardon, pardon…

Combien j’ai peiné pour vivre la pauvreté de Dieu. La notion de Dieu pauvre, je l’avais dans l’esprit depuis que j’ai écrit Le Poème de la Sainte Liturgie, mais ce n’est que plus tard, beaucoup plus tard, que j’ai rencontré le Dieu pauvre. Combien j’ai peiné pour apprendre la pauvreté de Dieu, je veux dire à mettre la pauvreté de Dieu dans ma vie et aussi à connaître le Dieu Pauvre ! Combien j’ai peiné pour ne pas rentrer dans les discussions et pour ne pas discuter ! Combien j’ai peiné pour prendre la dernière place ! La pauvreté de Dieu devient tous les jours plus claire pour moi, tous les jours plus exigeante : c’est tous les jours à recommencer et à me convertir de nouveau chaque matin.

Chaque jour m’est nouveau et, lorsque je dis la Messe, je trouve tous les jours la ferveur de mes vingt-deux ans et davantage. La Messe est toujours nouvelle pour moi et toujours plus merveilleuse. Tout cela m’a été donné et je n’y suis pour rien.

Hier soir, j’ai eu une réunion de prêtres : il y en avait 36, Cela s’est bien passé et je leur ai dit le fond de mon cœur. L’union de tous ces prêtres de pays et de rites si divers est une chose magnifique. Cela ne se trouve pas partout. Après toutes ces années, c’était bon de pouvoir dire librement et simplement ce que je pensais. En effet je n’ai, d’ordinaire, pas eu de grandes difficultés pour obtenir l’imprimatur pour mes livres. Ce qui m’assure que ma pensée, présentée avec soin, n’est pas en contradiction avec la foi vécue et l’Église et, finalement, ce que je dis est reçu parce que cela porte la vérité de l’expérience.

Pendant toute ma vie, j’ai beaucoup travaillé, mais peut-être pas assez. Et je vais continuer à travailler tant que Dieu m’en laisse la force. Pour donner une réponse valable à toutes ces questions qui se posent, il faut être au courant de tout. Il faut assumer personnellement tous ces problèmes. Continuellement, il faut étudier, tant tout change et avec quelle rapidité ! Il faut connaître les dernières inventions des machines électroniques, les dernières méthodes en mathématiques, les plus récentes découvertes de la psychologie, de la psychanalyse, de la biologie, de la sociologie, de la chimie, de la médecine, de la science, des philosophies modernes, de la technique, etc. Tout cela requiert un temps énorme, de la discipline, de la méthode. Mais aussi, tout cela nourrit ma pensée, la garde jeune et me donne plus d’inspiration que maint livre spirituel. J’ai 12 conférences écrites sur les sujets actuels les plus discutés et cela pourra faire un livre. Alors je compte sur vous pour m’aider dans mon travail.

Ces 30 ans, qui ont si vite passés, m’ont apporté votre amitié et votre fidélité, qui me sont infiniment précieuses et pour lesquelles je vous remercie de tout mon cœur. De telles amitiés ne peuvent être faites que par la Sainte Vierge et c’est elle, je pense, qui m’a fait rencontrer des êtres qui appellent ces confidences. Trente années où j’aurais dû être une transparence totale à Dieu et je ne l’ai pas été. Pardon… Merci.

Toutes ces années, j’ai suivi le Carmel de très près, j’ai partagé ses souffrances et j’ai vécu avec vous ses heures difficiles. J’ai assisté aussi à sa résurgence et vous vous trouvez aujourd’hui en pleine sérénité : j’en remercie le Seigneur.

Maintenant, la charité fleurit – c’est le principal – et vous entourez cette chère malade d’attentions et de bonté. C’est une bonne âme et cette mort lente est comme une longue agonie. Je vous remercie de votre charité à son égard : elle en a besoin.

J’ai besoin de vous, de vos prières, de votre silence et l’Église, l’Église a besoin de vous plus que jamais à cette heure critique de son histoire. Que votre recueillement, votre amour, votre dépouillement, votre pauvreté sont nécessaires, indispensables, aujourd’hui : le Saint-Père, les prêtres, les religieux ont besoin de vous.

Pensez aux jeunes prêtres. Vous n’avez pas idée de ce que c’est pour un prêtre d’être entouré de femmes. Combien ont besoin de votre vie cachée de votre générosité, de votre présence, votre présence à Dieu et au monde. Ils doivent sentir qu’ils peuvent compter sur vous.

Je ne crois pas à l’action, je crois à la présence.

Demandons donc à la très Sainte Vierge la grâce de rester fidèles jusqu’au bout. La Sainte Vierge est tout pour moi. Elle est ma vie, ma douceur, mon espérance. Je lui dois tout: Elle est la vie de ma vie. Elle a tout fait pour moi et elle le fera encore. Elle nous protégera tous, vous et moi, toujours, je l’espère.

Encore pardon et merci.

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